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Marcus Junianus Justinus
Abrégé des Histoires Philippiques de Trogue Pompée.
texte établi et traduit par Marie-Pierre Arnaud-Lindet.

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Livre XXVIII

Dèmètrios II. Antigone Doson, Prélude à la guerre démétriaque, 1,1—Les Acarnaniens demandent de l'aide aux Romains 1,5—Discours des Étoliens, 2,1—Fin de la dynastie des Éacides, 3,1—Antigone Doson 3,9—Guerre de Cléomène, 4,1.


1 2 3 4

Prélude à la guerre démétriaque 1,1 Alors qu'Olympias, fille du roi d'Épire Pyrrhos, ayant perdu son mari qui était son frère germain1, avait assumé la tutelle des enfants qu'elle avait eus de lui, Pyrrhos2 et Ptolémée3, et le gouvernement du royaume, les Étoliens voulant lui arracher une partie de l'Acarnanie que le père de ses pupilles avait reçu en contribution de guerre, elle se précipita auprès de Dèmètrios4; 2 bien qu'il eut déjà une épouse, la sœur du roi de Syrie Antiochos5, elle lui donna sa fille Phthia en mariage pour obtenir de lui, à titre de parente, l'aide qu'elle n'avait pu obtenir de sa pitié. 3 On fait donc les noces6: la nouvelle union fait acquérir du crédit, la rupture de l'ancienne entraîne un affront. 4 En effet, la première épouse, répudiée pour ainsi dire, s'en va de son propre gré chez son frère Antiochos et le pousse à faire la guerre à son mari7.

Les Acarnaniens demandent de l'aide aux Romains 5 Quant aux Acarnaniens, ils se défiaient des Épirotes ; implorant l'aide des Romains contre les Étoliens, ils obtinrent du sénat romain l'envoi d'ambassadeurs 6 qui notifieraient aux Étoliens d'enlever leurs garnisons des villes d'Acarnanie et d'admettre que soient libres ceux qui avaient été autrefois les seuls à ne pas envoyer des contingents aux Grecs contre les Troyens, fondateurs de la race romaine8.

Discours des Étoliens
2,1 Cependant les Étoliens écoutèrent avec morgue l'ambassade des Romains, leur objectant les Puniques et les Gaulois par lesquels ils avaient été taillés en pièces au cours de tant de guerres, 2 et disant qu'avant de transférer leurs armes contre la Grèce, il leur fallait ouvrir contre les Carthaginois les portes que la peur de la guerre punique avait fermées9.

3 Ensuite, ils leur conseillent de se rappeler qui est une menace pour qui : 4 les Romains n'avaient pas pu prémunir leur ville des Gaulois, et une fois prise, ils ne l'avaient pas protégée par les armes, mais rachetée avec de l'or ; 5 quant à eux, ils avaient anéanti ce peuple tout entier, entré en Grèce avec une troupe quelque peu plus importante, et ce non seulement sans l'aide d'aucune force étrangère, mais encore sans même user de toutes les forces qui leur appartenaient, et ils avaient offert pour sépulture à ces gens le lieu oô ils avaient prévu d'établir leurs villes et leur empire10; 6 en revanche, quand les Romains étaient éperdus après l'incendie de leur ville, la presque totalité de l'Italie avait été occupée par les Gaulois ; 7 qu'ils chassent donc les Gaulois d'Italie avant de menacer les Étoliens et qu'ils commencent par protéger leurs biens!

8 Quelle sorte d'hommes étaient donc les Romains ? n'étaient-ils pas des bergers qui occupaient un sol arraché par brigandage à ses véritables maîtres, 9 qui, comme ils ne trouvaient pas d'épouses à cause du déshonneur de leur origine, en avaient enlevé par une violence officielle, 10 qui enfin avaient fondé la ville elle-même par un parricide, et arrosé les fondations de ses murs avec le sang d'un frère ?

11 Les Étoliens, pour leur part, avaient toujours été les premiers de la Grèce et l'avaient emporté sur les autres aussi bien en dignité qu'en valeur militaire ; 12 ils étaient enfin les seuls qui avaient bravé les Macédoniens, riches toujours de l'empire du monde, qui n'avaient pas craint le roi Philippe, qui avaient méprisé les édits d'Alexandre le Grand11 après sa victoire sur les Perses et les Indiens, quand tous redoutaient son nom. 13 Ils engageaient donc les Romains à se contenter de leur fortune actuelle et à ne pas défier les armes par lesquelles ils voyaient que les Gaulois avaient été massacrés et les Macédoniens bravés.

14 L'ambassade des Romains ayant ainsi été renvoyée, les Étoliens ravagent les territoires du royaume d'Épire et de l'Acarnanie pour ne pas paraître plus courageux en paroles qu'en actes.

Fin de la dynastie des Éacides
3,1 À ce moment, Olympias avait remis à ses fils le pouvoir royal, et Ptolémée avait succédé à son défunt frère Pyrrhos ; 2 alors qu'il s'était avancé à la rencontre des ennemis avec une armée organisée, il fut pris de faiblesse et mourut en chemin. 3 Olympias, pour sa part, affligée par la double blessure de ces deuils, se maintenant en vie avec peine, ne survécut pas longtemps à ses fils12.

4 Comme, de la famille royale, il ne restait plus qu'une jeune fille, Néréis, et sa sœur Laodamie, Néréis épouse Gélon, le fils du tyran de Sicile13, 5 et Laodamie est tuée par la foule amassée alors qu'elle s'était réfugiée à l'autel de Diane.

6 Les immortels tirèrent vengeance de ce crime par une série de catastrophes qui atteignirent le peuple, et par la mort de presque tous les citoyens. 7 En effet, après avoir souffert de la stérilité et de la famine et avoir été tourmentés par la discorde civile, ils furent en dernier lieu presque totalement anéantis dans des guerres étrangères. 8 Quant à Milon, l'assassin de Laodamie, devenu fou furieux, il se déchira les entrailles, tantôt avec une épée, tantôt avec une pierre, enfin avec les dents, et mourut le douzième jour.

Antigone Doson 9 Pendant que cela se passait en Épire, entre temps en Macédoine, le roi Dèmètrios meurt14 en laissant un fils, Philippe15, encore un petit enfant, 10 et Antigone16, le tuteur qui lui est donné, travaille à se faire roi après avoir épousé la mère de son pupille.

11 Ensuite, du temps s'étant passé, alors qu'il était tenu enfermé dans le palais par une dangereuse révolte de Macédoniens, il s'avance en public sans gardes du corps 12 et, ayant jeté à la foule le diadème et la pourpre, il ordonne aux gens de donner cela à un autre : ou bien quelqu'un qui ne saurait pas les commander, ou bien quelqu'un à qui eux-mêmes sauraient obéir ; 13 ce pouvoir royal, qui exitait encore l'envie, il n'en avait pas lui-même connaissance par des jouissances, mais par des peines et des dangers. 14 Ensuite, il rappelle ses bienfaits : comment il a tiré vengeance de la défection des alliés, comment il a arrêté les Dardaniens et les Thessaliens exultant de la mort de Dèmètrios, comment enfin il n'a pas seulement défendu, mais encore accru la dignité des Macédoniens. 15 Si les Macédoniens regrettent cela, il dépose son commandement et leur remet sa charge, puisqu'ils cherchent un roi à qui ils puissent commander.

16 Comme le peuple, dans un mouvement de honte, lui demandait de reprendre le pouvoir royal, il refusa aussi longtemps que les auteurs de la sédition ne furent pas menés au supplice.

Guerre de Cléomène
4,1 Après cela, il déclare la guerre aux Spartiates, les seuls qui, au cours des guerres de Philippe et d'Alexandre, avaient bravé le pouvoir des Macédoniens et les armes craintes de tous. 2 Entre deux peuples si illustres, la guerre17 mobilisa les plus grandes forces de part et d'autre, tandis que les uns combattaient au nom de l'ancienne gloire des Macédoniens, les autres, non seulement au nom de la liberté intégrale, mais encore au nom de leur salut.

3 Vaincus, les Lacédémoniens supportèrent l'adversité avec un grand courage, non seulement eux-mêmes, mais aussi leurs épouses et leurs enfants. 4 À la vérité, dans les rangs, personne ne pensa à sa sauvegarde, aucune femme ne pleura la perte de son époux; les vieillards glorifiaient les morts de leurs fils, les fils rendaient hommage à leurs pères, morts au front, tous se plaignaient de leur sort parce qu'ils n'étaient pas tombés aussi eux-mêmes pour la liberté de leur patrie. 5 Dans les maisons grandes ouvertes, tous recueillaient les blessés, soignaient les blessures, réconfortaient ceux qui étaient épuisés ; 6 cependant il n'y avait ni tumulte, ni agitation dans la ville et tous déploraient davantage le malheur de l'état que les malheurs individuels.

7 Cependant le roi Cléomène, après avoir tué beaucoup d'ennemis, survint trempé de sang sur tout le corps, le sien aussi bien que celui des ennemis, 8 et, une fois entré dans la ville, il ne s'assit pas par terre, il ne réclama pas à boire et à manger, enfin il ne se débarrassa pas de ses armes pesantes, 9 mais, appuyé à un mur, alors qu'il considérait que quatre mille hommes18 seulement avaient survécu à la bataille, il les exhorta à se réserver pour des temps meilleurs pour l'état19; 10 alors, il part pour l'Égypte, avec son épouse et ses enfants, auprès de Ptolémée ; accueilli avec honneur par ce dernier, il vécut longtemps en bénéficiant de la plus haute considération du roi. 11 À la fin, après la mort de Ptolémée, il est tué avec toute sa famille par le fils de ce dernier20.

12 Quant à Antigone, après le massacre des Spartiates, ayant eu pitié de l'infortune d'une si grande ville, il empêcha ses soldats de la piller et fit grâce à ceux qui avaient survécu ; 13 il proclama qu'il avait été en guerre avec Cléomène, non avec les Spartiates, et que toute colère avait été éteinte par la fuite du roi, 14 et que sa gloire ne serait pas moindre si on rapportait que Lacédémone avait été sauvegardée par celui qui avait été le seul à la prendre ; 15 il faisait donc grâce au sol de la ville et à ses demeures, puisqu'il ne restait pas d'hommes à qui faire grâce.

16 Peu de temps après, il mourut lui même21 et il laissa le pouvoir royal à son pupille, Philippe, qui avait quatorze ans.


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1 Alexandre II mourut, selon la chronologie traditionnelle, c. 255 a.C. Il était le fils de Lanassa, donc le frère consanguin d'Olympias, fille d'Antigonè, et non pas son frère germain comme l'écrit Justin.

2 Pyrrhos II (c. 255-234 a.C.)

3 Roi seul en 234 pour quelques mois.

4 Dèmètrios II, fils d'Antigone Gonatas, roi de Macédoine en 239 a.C.

5 Stratonice (II), sœur d'Antiochos II Qeo/s, avait en fait été répudiée dès 244 a.C. Dèmètrios avait alors épousé Nicée, veuve de son cousin Alexandre, le fils de Cratère.

6 239 ou 238 a.C.

7 Antiochos II est mort en 246 a.C. ; c'est son fils Séleucos II Kalli/nikos qui régnait au moment de la répudiation de Stratonice. On ne sait rien sur une amorce de guerre entre Séleucos et Dèmètrios ; en revanche, le Séleucide fit tuer sa tante qui complotait contre lui c. 235 a.C.

8 Cette ambassade, de date incertaine, n'est pas mentionnée dans d'autres sources ; on peut douter de sa réalité : en effet, ce n'est qu'à partir de 230 que les Romains commencent à intervenir en Illyrie, et d'autre part les arguments de la réponse des Étoliens, ci-après, ont des fondements anachroniques, et annoncent un peu trop ceux développés dans le grand discours de Mithridate (cf. infra,
38,4-7).

9 Les portes du Janus ont été fermées pour la première fois sous la République par le consul patricien T. Manlius Torquatus, après la fin de la première guerre punique en 235 a.C., et la victoire incontestable des Romains (Liv. 1,19,3).

10 Cf. supra,
24,6,4 sqq.

11 Cf. supra,
13,5,1 sqq.

12 Olympias serait morte c.230 a.C. Des sources tardives la donnent comme empoisonnée par son fils (Helladios, dans Photius).

13 En 232 a.C. Gélon était le fils de Hiéron de Syracuse (cf. supra,
23,4,1-15) ; il mourut avant son père, en 218 a.C. (cf. Liv., 23,30,10).

14 Dèmètrios II, le fils d'Antigone Gonatas, en 229 a.C.

15 Philippe V, né de Phthia en 238 a.C., régnera de 221 à 179.

16 Antigone III Dôson (Dwsw/n), fils de Dèmètrios le Beau (cf. supra,
26,3,3-8).

17 Guerre dite "de Cléomène", du nom du roi agiade réformateur de Sparte, Cléomène III (229-222 a.C.), contre lequel s'étaient alliés les Macédoniens et la ligue achéenne. La guerre se termine par la déroute spartiate à Sellasia en juil. 222 ; cette défaite marque la fin de l'indépendance de Sparte. L'histoire de Cléomène est assez bien connue par Polybe, hostile au roi parce qu'il est achéen et a comme source les Mémoires d'Aratos), et Plutarque, Vie de Cléomène, qui lui est favorable, et dont la source principale est Philarque d'Athènes, comme cela semble être le cas, ici, pour Trogue Pompée.

18 Deux cents, dit Plutarque (Cl. 28,5) ce qui paraît plus vraisemblable ; quatre mille est le nombre des citoyens fixé par la réforme de 227 a.C.

19 Hortatus ut se ad meliora rei publicae tempora reseruarent : cf. l'ordre donné par Léonidas aux Lacédémoniens avant la bataille des Thermopyles (supra,
2,1,5)

20 Ptolémée IV Philopator succède à son père Ptolémée III en 221 a.C. Cléomène se suicida l'année suivante à Alexandrie (cf. Polybe, 2,69 ; 5,39).

21 Antigone est mort d'une maladie pulmonaire, en 221 a.C. (cf. Polybe, 2,70).


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